Fleurs sans lieu
Misterien Verflechtungen

Temple of Seeds

Lors de la rénovation de ma vieille maison, je suis tombée sur la mâchoire d’un bœuf enterrée sous la terre battue. S’agissait-il d’une relique de l’époque où les bœufs effectuaient les travaux dans les champs ou d’une offrande faite à la construction ?

J’ai enduit la mâchoire de bouse de vache pour la guérir et la revigorer avec cette seconde peau animale.

La superstition autour des offrandes faites aux nouvelles constructions m’a intriguée.

En Europe du Nord, dès le néolithique, on plaçait des mâchoires inférieures de porcs et de vaches sous les seuils des portes. Ces offrandes faites à des constructions profanes, étaient destinées à pérenniser le bâtiment ou à vénérer un esprit domestique.

Dans sa nouvelle «Der Schimmelreiter», Theodor Storm décrit un ancien culte selon lequel quelque chose de vivant doit être placé dans la digue afin que celle-ci ne se rompe pas lors d’une inondation. («Si votre digue doit tenir, il faut y mettre quelque chose de vivant ! … Un enfant est encore mieux ; s’il n’y en a pas, un chien fera l’affaire»).

Quelque chose de «vivant» comme un chien, ou alors un être humain ! Theodor Storm s’est inspiré ici d’un fait réel, à savoir l’inondation du siècle de 1685, lorsque la digue de Brunsbüttel fut emportée par les flots déchaînés de l’Elbe et de la mer. On a fait croire à la population de la région que la rupture de la digue ne pourrait être ni comblée ni sauvée tant qu’un enfant n’aurait pas été acheté et jeté vivant dans la rupture comme fondation.

L’histoire ne dit pas si ce sacrifice macabre a réellement eu lieu. Nous savons seulement que les fortes marées de tempête du 25 décembre 1717 («marée de Noël»), du 25 février 1718 («marée de glace») et du 31 décembre 1720 («marée du Nouvel An») ont de nouveau mis à mal la digue de l’Elbe et fait de nombreuses victimes.

A la manière des ouvriers qui construisent les digues, j’ai érigé une tour avec des pierres faites de bouse de vache, le «Temple of seeds».

Au lieu d’un sacrifice vivant, j’ai ajouté des graines et des mousses dans les fondations afin de «sanctifier» la tour, grâce à ce don, et d’assurer sa solidité et sa durabilité.

La tour est une banque de graines d’arbres et d’herbes qui illustrent la diversité végétale. Dans la bouse de vache, elles trouvent un environnement idéal pour germer et s’épanouir.

«Temple of seeds» évoque le bunker de haute sécurité du Svalbard, où le patrimoine végétal de l’humanité, plus de 850.000 variétés, a été déposé par toutes les nations du monde afin de les protéger des dangers de notre monde.  

Matériau :           Végétaux in-et digérés
Dimension :        100/30 cm environ modulable

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